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CH. XII. LE CITOYEN ET L’ÉTRANGER.

Encore faut-il noter que l’homme si péniblement admis comme citoyen ne pouvait être ni archonte ni prêtre. La cité lui permettait bien d’assister à son culte ; mais quant à y présider, c’eût été trop.

Nul ne pouvait devenir citoyen à Athènes, s’il était citoyen dans une autre ville[1]. Car il y avait une impossibilité religieuse à être à la fois membre de deux cités, comme nous avons vu qu’il y en avait une à être membre de deux familles. On ne pouvait pas être de deux religions à la fois.

La participation au culte entraînait avec elle la possession des droits. Comme le citoyen pouvait assister au sacrifice qui précédait l’assemblée, il y pouvait aussi voter. Comme il pouvait faire les sacrifices au nom de la cité, il pouvait être prytane et archonte. Ayant la religion de la cité, il pouvait en invoquer la loi et accomplir tous les rites de la procédure.

L’étranger au contraire n’ayant aucune part à la religion n’avait aucun droit. S’il entrait dans l’enceinte sacrée que le prêtre avait tracée pour l’assemblée, il était puni de mort. Les lois de la cité n’existaient pas pour lui. S’il avait commis un délit, il était traité comme l’esclave et puni sans forme de procès, la cité ne lui devant aucune justice[2]. Lorsqu’on est arrivé à sentir le besoin d’avoir une justice pour l’étranger, il a fallu établir un tribunal exceptionnel. À Rome, pour juger l’étranger, le préteur a dû se faire étranger lui-même (prætor peregrinus). À Athènes le juge des étrangers a été le polémarque, c’est-à-dire le magistrat qui était

  1. Plutarque, Solon, 24. Cicéron, pro Cœcina, 34.
  2. Aristote, Pol., III, 43. Platon, Lois, VI.