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LIVRE III. LA CITÉ.

avait pas d’autre type de société que celui-là. Dans chacun de ces cadres il instituait un héros éponyme, il établissait des sacrifices, il inaugurait des traditions. C’était toujours par là que l’on commençait, si l’on voulait fonder une société régulière. Ainsi fait Platon lui-même lorsqu’il imagine une cité modèle[1].


CHAPITRE IV.

LA VILLE.

Cité et ville n’étaient pas des mots synonymes chez les anciens. La cité était l’association religieuse et politique des familles et des tribus ; la ville était le lieu de réunion, le domicile de cette association.

Il ne faudrait pas nous faire des villes anciennes l’idée que nous donnent celles que nous voyons s’élever de nos jours. On bâtit quelques maisons, c’est un village ; insensiblement le nombre des maisons s’accroît, c’est une ville ; et nous finissons, s’il y a lieu, par l’entourer d’un fossé et d’une muraille. Une ville, chez les anciens, ne se formait pas à la longue, par le lent accroissement du nombre des hommes et des constructions. On fondait une ville d’un seul coup, tout entière en un jour.

Mais il fallait que la cité fût constituée d’abord, et c’était l’œuvre la plus difficile et ordinairement la plus longue. Une fois que les familles, les phratries et les tribus étaient convenues de s’unir et d’avoir un même culte, aussitôt on fondait la ville pour être le sanctuaire de ce culte commun. Aussi la fondation d’une ville était-elle toujours un acte religieux.

  1. Platon, Lois, V, 738, VI, 771. Hérodote, IV, 161.