Page:Fustel de Coulanges - La Cité antique, 1864.djvu/138

Cette page a été validée par deux contributeurs.
126
LIVRE II. LA FAMILLE.

Il en était de même chez les Romains. Velléius parle du tombeau de la gens Quintilia, et Suétone nous apprend que la gens Claudia avait le lieu de la sépulture sur la pente du mont Capitolin[1].

L’ancien droit de Rome considère les membres d’une gens comme aptes à hériter les uns des autres. Les Douze-Tables prononcent que, à défaut de fils et d’agnats, le gentilis est héritier naturel. Dans cette législation, le gentilis est donc plus proche que le cognat, c’est-à-dire plus proche que le parent par les femmes.

Rien n’est plus étroitement lié que les membres d’une gens. Unis dans la célébration des mêmes cérémonies sacrées, ils s’aident mutuellement dans tous les besoins de la vie. La gens entière répond de la dette d’un de ses membres ; elle rachète le prisonnier, elle paie l’amende du condamné. Si l’un des siens devient magistrat, elle se cotise pour payer les dépenses qu’entraîne toute magistrature[2].

L’accusé se fait accompagner au tribunal par tous les membres de sa gens ; cela marque la solidarité que la loi établit entre l’homme et le corps dont il fait partie. C’est un acte contraire à la religion que de plaider contre un homme de sa gens ou même de porter témoignage contre lui. Un Claudius, personnage considérable, était l’ennemi personnel d’Appius Claudius le décemvir ; quand celui-ci fut cité en justice et menacé de mort, Claudius se présenta pour le défendre et implora le peuple en sa faveur, non toutefois sans avertir que s’il faisait cette démarche, « ce n’était pas par affection, mais par devoir[3]. »

  1. Velléius, II, 119. Suétone, Tib., I ; Néron, 50.
  2. Tite-Live, V, 32. Denys d’Hal., Fragm., XIII, 5. Appien, Annib., 28.
  3. Denys d’Hal., XI, 14. Tite-Live, III, 58.