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où l’on voit aussi que les agri limitanei ne devaient appartenir qu’à des soldats et ne pouvaient être vendus à des hommes qui ne fussent pas soldats[1]. De ces deux textes législatifs il rapproche deux passages de l’Histoire Auguste. Le premier est de Lampride, qui dit qu’Alexandre Sévère « donna les terres prises sur l’ennemi aux chefs et aux soldats des frontières, sous cette condition que leurs héritiers seraient soldats et que ces terres ne pourraient appartenir à des hommes qui ne fussent pas soldats ». Le second est de Vopiscus, qui rapporte que Probus « donna aux vétérans certaines terres de l’Isaurie, ajoutant que leurs enfants mâles devraient être soldats à partir de l’âge de dix-huit ans ». Sur ces quatre textes, Godefroi fait cette réflexion : « C’est ici une espèce de fief ; car on y retrouve la condition ordinaire, qui était que le concessionnaire dût au concédant la fidélité et le service militaire[2]. » Et un peu plus loin : « C’était par cette sorte de fief et de bénéfice que les empereurs récompensaient les fatigues de leurs soldats[3]. » Comparant encore ces soldats aux Lètes des terres létiques et même aux leudes, il ajoute : « Ils étaient une sorte de vassaux voués à la guerre[4]. » Il énumère les conditions attachées à ces concessions impériales et il en compte trois : la première est le service militaire ; la seconde est l’interdiction de vendre, au moins à des hommes qui ne soient pas soldats ; la troisième est l’hérédité, réduite à la succession de mâle en

  1. Novelles de Théodose II, édit. Hænel, XXIV, § 4, p. 105–106, ou au Code Justinien, XI, 60 (59), 3.
  2. Godefroi, édit. Ritter, t. II, p. 398 : Est hæc species quædam feudi. Sane similis lex erat fundorum constituendorum, ut qui prædium acciperet, danti fidem et militiæ ferme munus exhiberet.
  3. Ibidem, p. 399 : Veteranos hoc quasi feudi bencficiique genere pensari, post exsudatos militiæ labores…
  4. Ibidem : Vasallorum et hominum genus militiæ adstrictum.