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souvenirs d’une actrice.

habitations des propriétaires et des malheureux fermiers, ils s’inquiétaient peu de leurs opinions. Ceux qui avaient perdu leur famille et leurs biens à la révolution étaient d’honnêtes gens qui ne cherchaient point à s’en dédommager par de semblables moyens ; mais, dans tous les partis, on a toujours cherché à couvrir de mauvaises actions par des sophismes. Lorsque les assignats parurent, il se forma une compagnie pour en fabriquer de faux, afin de les discréditer. Ces messieurs se chargeaient de les faire colporter ; tout cela avec les meilleures intentions du monde, et pour ruiner la République qui les avait ruinés. Mais ils ne songeaient probablement pas que la fortune des particuliers, qui en étaient fort innocents, se perdait également.

Voici une aventure qui m’arriva en ce temps-là même, et lorsque j’étais à Lille. Il y a une très petite distance de cette ville à celle de Tournay, qui appartenait alors à l’Autriche, et, avant l’émigration, on y allait très fréquemment. Un simple poteau séparait les deux pays. Les communications étaient si faciles, que plusieurs habitants de Lille y