Page:Fusil - Souvenirs d’une actrice, Tome 2, 1841.djvu/6

Cette page a été validée par deux contributeurs.
3
souvenirs d’une actrice.

Quant à moi, il cherchait à m’effrayer sur le sort à venir des personnes de ma connaissance ou de mes amis, peut-être dans l’espoir de me faire parler aussi, mais nous jouyons au plus fin, car je causais volontiers avec lui dans la même intention. Il y avait à Boulogne une famille d’émigrés ; je ne la connaissais pas, mais lorsque nous nous rencontrions à la promenade nous nous saluions. Pereyra parlant souvent d’eux, je cherchai l’occasion de leur dire en passant un mot, pour les avertir de se tenir sur leurs gardes. Je fus assez long-temps sans pouvoir y parvenir : enfin, un jour que Pereyra me plaisantait, en les appelant mes amis, car il avait remarqué que je leur portais intérêt, je cherchai à lui faire dire quelque chose de plus.

— Que pourrait-il donc leur arriver de si fâcheux, s’ils étaient arrêtés ? lui dis-je en m’efforçant de sourire.

— Ah ! une misère ! ils seraient fusillés.

Je fis un mouvement.