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souvenirs d’une actrice.

— Mais je le pense bien ainsi, et c’est pour cela que je vous l’apporte.

— Je suis horriblement enrhumée, madame la comtesse, et il me serait impossible de chanter.

— Vous ne vous fatiguerez pas, vous chanterez tout bas, ce que vous voudrez.

— Vous compromettriez, si je chantais, cette brillante réputation que vous avez bien voulu me faire, car il m’est impossible de donner un son.

Toutes les instances, toutes les flatteries que l’on put employer, furent inutiles, je ne voulus point céder.

La comtesse se mordait les lèvres, et je voyais à sa figure, combien elle était désappointée ; je m’attendais à quelques mots piquants ; mais j’étais disposée à répondre, quoique avec politesse, et à ne pas me laisser humilier, dussé-je me brouiller avec elle. Je savais me tenir à ma place, quelque avance qu’ont pût me faire, mais je n’aurais pas souffert non plus qu’on m’en fit sortir.

Quand, dans un concert, on invite un artiste pour chanter, il aurait mauvaise grâce à se faire prier ;