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souvenirs d’une actrice.

n’avoir pu revoir mes amis ; j’étais loin de m’attendre à ce qui devait arriver, je n’en sus même les détails que long-temps après. Lady Montaigue, son mari et son frère, qui se félicitaient que j’eusse échappé à la triste destinée de nos compagnons de malheur, furent envoyés à Abbeville, jetés sur des charrettes les uns sur les autres comme des moutons qu’on envoie à la boucherie. La crainte des représailles leur sauva la vie, mais ils eurent beaucoup à souffrir dans les prisons. De tous les malheureux envoyés à Abbeville puis à Arras, pas un n’en revint. Un pauvre médecin de ma connaissance, M.  Butor, dont l’amabilité contrastait tant avec son nom, et qui était le plus honnête des hommes, était de ce nombre. Je suis encore à me demander comment j’ai pu me tirer des mains de cet homme féroce ; à la vérité j’étais sans crainte, car je ne me doutais pas du danger, et je crois qu’il y a une espèce de magnétisme qui agit sans qu’on s’en rende compte, et qui fait qu’on en impose à ceux dont on n’a pas peur. Le ton de franchise et d’assurance manque rarement de