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souvenirs d’une actrice.

voudrais pas, monsieur, ajoutai-je d’un ton suppliant ; ne pourrais-je par votre entremise parler au citoyen Lebon ? Je suis persuadée qu’il ne me ferait pas partir.

Il secoua la tête en signe d’incrédulité. Cependant, après avoir réfléchi un moment, il me dit :

— Attendez, je vais voir si cela est possible.

Après un quart d’heure, qui me parut un siècle, il rentra, me prit par le bras, et nous sortîmes ensemble. On me regardait avec envie, et cependant je traversais cette église avec tristesse : il est des moments où l’on a presque de la honte d’être plus heureux que les autres, car il semble qu’on leur dérobe quelque chose. La maison habitée par Joseph Lebon étant en face de notre église, nous y fûmes bientôt rendus. Il était devant la cheminée, mais il se retourna lorsque j’entrai, et il dit en riant : « Ah çà ! toutes les jolies femmes m’en veulent donc aujourd’hui. » Cela m’ayant enhardie un peu, je répondis modestement que l’obscurité m’était favorable. Voyant qu’il était d’assez bonne humeur, je repris