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ABS. ABS.


Prince absolu. commandement absolu. il a obtenu cela d’authorité absolue. ablatif absolu. un verbe absolu, qui n’a aucun regime. On appelle aussi, Jeudy absolu, le Jeudy saint, & dans les vieux titres, Absolutionis dies. Un Plenipotentiaire a un pouvoir absolu, & sans reserve. cet homme est absolu, il commande avec hauteur, & veut qu’on luy obeïsse sans raisonner.

Absolutoire. adj. Qui porte absolution. Il a eu une sentence absolutoire.

Tous ces mots viennent du Latin absolvere, Absoudre, delivrer, delier.

ABSORBER. v. act. Engloutir, emporter en tout, ou en partie. Il est peu en usage au propre, si ce n’est en parlant des animaux voraces : mais il se dit au figuré. Les frais qu’il a fallu faire pour l’exploitation de cette ferme, en ont absorbé tout le profit. les frais d’un scellé absorbent les plus clairs deniers de cette succession. ce goinfre a absorbé tout son patrimoine. Ce mot vient du Latin absorbeo, signifiant le même.

ABSOUDRE. v. act. Descharger d’une accusation, de la peine d’un crime. Absoudre un penitent en Confession, un accusé en Justice. on l’a absous à pur & à plein. On dit aussi en parlant d’un Roy deffunct, que Dieu absolve.

Absous, oute. adj. Affranchy ou delivré de crime.

Absous, se dit aussi en matiere civile. Un deffendeur conclut toûjours à être renvoyé quitte & absous de la demande qu’on luy a faite.

ABSOUTE. s. f. Ceremonie & benediction que font les Evêques la Semaine Sainte pour donner absolution des pechez, supposant la Confession Sacramentale. Il s’en fait aussi par les Curez dans les Paroisses le jour de Pasques.

ABSTENIR. v. neut. qui ne se dit qu’avec le pronom personnel, Se deffendre l’usage de quelque chose, se priver de quelque plaisir. Il faut s’abstenir du vin pendant la fievre. les Juifs étoient obligez de s’abstenir de leurs femmes pendant leurs purgations. il ne se peut abstenir de joüer, de parler. il faut s’abstenir de manger des choses deffenduës par la Loy, de faire des actions qu’elle condamne.

Abstenir, se dit aussi en matiere de recusation de Juges : & quand la Cour la trouve bien fondée, elle dit pour adoucir l’expression, que le Juge s’abstiendra, c’est à dire, de rapporter le procés, ou d’y opiner.

ABSTINENCE. s. f. Vertu morale par laquelle on s’abstient des choses deffenduës par la Loy, soit que ce soit un precepte essentiel, soit une ceremonie. C’est une espece de la temperance. Le grand jeusne, dit St. Augustin, est l’abstinence des vices. l’Eglise juge convenable aux Ecclesiastiques l’abstinence des femmes : elle a marqué aussi certains jours de jeusne, & d’abstinence. on fait des abstinences par un pur regime de vivre, comme de vin, de salines, &c.

Abstinence, signifie quelquefois une simple deffense de manger de la chair. L’Eglise ordonne simplement l’abstinence le jour de St. Marc, & non pas le jeusne. les mercredis sont des jours d’abstinence chez plusieurs Religieux. les devots font aussi des abstinences & des macerations volontaires.

ABSTINENT, ente. adj. Temperant à l’égard du boire & du manger. Les peuples du Midy sont plus abstinents que ceux du Septentrion.

Ces mots viennent du Latin abstinere, comme se tenere ab aliquâ re, Se priver de la jouïssance de quelque chose.

ABSTERGER. v. act. Terme de Medecine & de Chirurgie. Purger, nettoyer une playe.

Abstersif, ive. adj. Qui purge & nettoye. Medicament, purgation abstersive.

Ces mots viennent du Latin abstergo, qui signifie le même.


ABSTRACT, abstracte. Terme de Philosophie. Ce qu’on detache par la pensée de toute autre chose, afin d’en avoir une connoissance simple, & par luy-même. La quantité est un terme abstract, quand on la considere en elle-même, & sans être attachée à aucun corps, quoy qu’elle ne puisse subsister naturellement sans luy, ni luy sans elle. La blancheur est un terme abstract, quand on la considere detachée d’un sujet. de la connoissance des abstracts on parvient à celle des concrets, qui est le terme opposé.

Abstraction. s. f. Detachement qui se fait par la pensée de tous les accidens ou circonstances qui peuvent accompagner un être, pour le considerer mieux en luy-même. Pour bien juger d’un homme, il faut faire abstraction de tout ce qui nous peut preoccuper ou pour, ou contre luy.

Abstraire. v. act. Faire une abstraction, un detachement de toutes les qualitez d’une chose, pour ne considerer que son essence. Quand on raisonne en Algebre, on abstrait la quantité, le nombre de toutes sortes de matieres & de sujets.

Abstrait, aite. part. & adj. se dit figurément en Morale, d’un homme qui detache ses regards de tous les objets qui l’environnent, pour ne vaquer qu’à la contemplation de celuy qu’il a dans la pensée. Les Saints qui sont en extase sont des gens abstraits qui vaquent seulement à la contemplation des grandeurs & des beautez divines. On dit aussi, qu’un homme est abstrait, quand il ne répond pas à celuy qui luy parle, parce qu’il songe à autre chose.

Ces mots viennent du Latin abstrahere, comme trahere ab.

ABSTRUS, use. adj. Qui est caché & inconnu au commun du monde. L’Algebre, les Sections Coniques, sont des sciences, des matieres fort abstruses, où peu de personnes peuvent penetrer. Ce mot vient d’abstrudere, Cacher, enfoncer.

ABSURDE. adj. masc. & fem. Terme de Philosophie. Ce qui choque le sens commun, qui est impertinent, incroyable, impossible. Proposition absurde. quand on suppose une chose absurde, on en tire mille consequences absurdes. il prouve une chose absurde par une chose plus absurde.

Absurdement. adv. D’une maniere absurde. C’est conclure absurdement, que de dire, &c.

Absurdité. s. f. Qui contient quelque chose d’absurde. Il s’ensuivroit de grandes absurditez d’une telle supposition. la plus grande des absurditez est la contradiction.

Ce mot vient du Latin surdus. On voudroit estre sourd pour ne pas entendre les choses ridicules. En Grec, Ridicule se dit asymphonos, comme deplaisant à l’oreille.

ABSYNTHE. subst. masc. & fem. selon Malherbe ; & selon Vaugelas, toûjours masculin. Plante medicinale. L’absynthe commune a une tige fort branchuë, des feuilles blanches, & fort decouppées, comme l’artemisia, ses fleurs dorées & petites. Sa graine est ronde, & disposée comme une grappe de raisin. Sa racine est fort esparpillée. Plusieurs croyent que c’est la barbotine, qu’on appelle semen sanctum. Mais Mathiole dit que c’est une plante bien differente. Quelques-uns pretendent que l’absynthe est l’auronne femelle. Il y a une espece d’absynthe qu’on appelle petite aluyne, qui est semblable à la petite auronne, estant toute entassée de petite graine fort amere, qu’on appelle en Latin absynthium marinum, ou seriphium. L’absynthe santonique est sa troisiéme espece, qui est semblable à l’aluyne, mais qui est moins chargé de graine que l’autre. On fait du vin d’absynthe, & de l’eau d’absynthe.

Ce mot vient d’a particule privative en Grec, & pinthion, de pino, bibo, plante si amere, qu’on a de la peine à boire une liqueur dans laquelle elle aura trempé.


ABUNA