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ABI. ABL. ABN. ABO.


mot vient d’abjicio, qui signifie, Jetter par mépris, abandonner une chose comme inutile.

ABINTESTAT. Terme de Jurisprudence, qui se dit de celuy qui herite d’un homme qui n’a point fait de testament. Ce fils est heritier de son pere abintestat. Il y a eu un temps où l’on privoit de sepulture ceux qui étoient decedez abintestat : ce qui donna lieu à un Arrest du 19. Mars 1409. portant deffenses à l’Evêque d’Amiens d’empêcher comme il faisoit la sepulture des decedez abintestat.

ABJURATION. s. f. Renonciation solemnelle à une erreur, à une heresie. Ce Ministre a fait abjuration entre les mains de l’Evêque.

Abjurer. v. act. Renoncer solemnellement à quelque mauvaise doctrine, à des maximes erronées. Cet homme a abjuré les erreurs de Calvin ; ou simplement, a abjuré, pour dire, il a changé de Religion, il s’est converty. On a dit autrefois, Abjurer sa patrie, pour dire, Quitter la province pour n’y plus retourner, comme font les bannis & les proscrits.

Abjuré, ée. part. pass. & adj.

Tous ces mots viennent d’abjurare, qui signifie la même chose.

ABL.

ABLAIS. s. m. Terme de Palais. Despouille de bleds. La Coûtume d’Amiens deffend d’enlever les fruits, & ablais, quand ils sont saisis, sans donner caution au Seigneur de ses droits.

ABLATIF. s. m. Terme de Grammaire. Sixiéme cas de la declinaison du nom & du participe. On dit aussi Ablatif absolu, quand il est sans regime. On l’a nommé autrefois Ablatif égaré. Le mot d’ablatif Latin a été fait ab auferendo. Priscien l’appelle aussi Comparatif, parce qu’il ne sert pas moins à comparer qu’à ôter parmy les Latins.

ABLE, ou ABLETTE. Petit poisson blanc qui se trouve dans les rivieres. En Latin alburnus. Il semble que ce mot vient d’albus, & qu’on dit able, pour albe, à cause de sa blancheur, par une simple transposition de lettres assez ordinaire dans les Langues.

Ableret. Terme de pesche. C’est une espece de filet carré attaché au bout d’une perche avec lequel on pesche les ables, ou autres petits poissons blancs : ce qui est permis par plusieurs Coûtumes. On l’appelle en quelque pays trable étiquette, ou simplement, carré.

ABLOQUIEZ. adject. plur. Terme de Coûtume. Celle d’Amiens deffend aux tenanciers de démolir aucuns édifices abloquiez, & solivez dans l’heritage qu’ils tiennent en roture, sans le consentement de leur Seigneur. Ces mots viennent apparemment de amovere à loco & à solo.

ABLUTION. s. f. Qui n’est en usage en François que pour signifier cette goutte de vin qu’on prend aprés la Communion pour consommer plus facilement la Sainte Hostie, ou ce qui sert à laver les doigts du Prêtre qui a consacré, ou dans quelque autre ceremonie ecclesiastique.

Ablution, se dit aussi chez les Religieux qui portent des habits blancs, de l’action avec laquelle on les blanchit & on les nettoye. Il y a des écriteaux qu’on met dans les Cloistres pour marquer les jours d’ablution. Ce mot vient du Latin ablutio, qui signifie l’action de purifier, de nettoyer.

ABN.

ABNEGATION. s. f. Terme de devotion. Renonciation à ses passions, à ses plaisirs, à ses interests. L’abnegation de soy-même est un des Conseils Evange-


liques, & est necessaire pour la perfection Chrêtienne. Ce terme vient du Latin abnegare, qui signifie, Desavoüer, ne vouloir point reconnoistre une chose comme sienne.

ABO.

ABOLIR. v. act. Mettre quelque chose hors d’usage, l’effacer, la mettre à neant. Le Magistrat a aboli cette méchante coûtume. le Roy a aboli une telle loy, une telle procedure ; il a entierement aboli les duels. Le temps a aboli les plus beaux monumens de l’antiquité. il n’y a que le Roy qui puisse abolir un crime. Ce mot vient du Latin abolere, ita extinguere & delere, ut ne oleat quidem.

Abolir, se dit aussi avec le pronom personnel. Les Mandats Apostoliques se sont abolis par un non-usage. il ne faut pas souffrir que les bonnes coûtumes s’abolissent.

Aboli, ie. part. pass. & adj. Loy abolie. crime aboli.

ABOLISSEMENT. s. m. Abrogation. L’abolissement, ou l’abrogation des loix se fait par l’establissement des nouvelles. l’abolissement des coûtumes arrive par la succession de temps, par le non-usage.

ABOLITION. s. f. Terme de Chancellerie. Lettres du Prince par lesquelles il abolit entierement un crime quel qu’il soit, sans même qu’on soit tenu d’en expliquer les circonstances, & de les rendre conformes aux informations, ainsi qu’il est requis aux lettres de grace, qui ne s’accordent que pour les cas remissibles. Les lettres d’abolition doivent contenir cette clause : En quelque sorte & maniere que le cas puisse être arrivé. l’amnistie est une abolition generale de tout ce qui s’est commis durant la guerre civile. un vray acte de contrition emporte l’abolition de tous les pechez.

Abolition, signifie aussi, la destruction d’une loy, d’une coûtume. L’abolition des ceremonies Judaïques s’est faite par la Loy de grace. on a eu bien de la peine à faire une entiere abolition des superstitions Payennes.

ABOMINABLE. adj. masc. & fem. Horrible, detestable en son genre, execrable. Le repas d’Atrée & de Thyeste fut un repas abominable. Neron estoit un monstre abominable. l’heresie d’Arrius étoit abominable. le parricide est un crime abominable. une phrase abominable, qui est fort méchante.

Abominablement. adv. Execrablement, horriblement. Il en a usé avec luy abominablement : il luy estoit obligé de la vie, & il l’a voulu assassiner.

Abomination. s. f. Horreur, execration. L’Eglise a cette opinion en abomination. il se commet dans le Sabbath de grandes abominations.

Abominer. v. act. Vieux mot qui n’est plus en usage, Avoir en horreur. Il vient de ab & ominari, c’est à dire, malè ominari. Covarruvias.

Ces mots viennent d’abominari, comme qui diroit, rejicere tanquam malum omen, Rejetter une chose comme si elle estoit de mauvais augure.

ABONDAMMENT. adv. En abondance. Cette source donne de l’eau abondamment. cet homme est fort à son aise, il a abondamment dequoy vivre.

Abondance. s. f. Foison, affluence de plusieurs choses en un même lieu. La commodité des rivieres ameine l’abondance à Paris. la cherté est souvent cause de l’abondance. il a abondance de bien, ou des biens en abondance. On dit aussi, abondance de droit. Dieu verse sur nous ses graces en abondance. On appelle la corne d’Amalthée, la corne d’Abondance. On dit proverbialement, De l’abondance du cœur la bouche parle, pour dire, qu’on est contraint de declarer les sentimens des choses qui nous pressent.

ABONDANT, ANTE. adj. Qui a abondance. Un jardin abondant en fruits. la Langue Grecque est fort abondante