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Nostre pauvre autheur, qui n’avoit pas eu mesme de la loüange pour son argent, chercha plusieurs autres occasions, dans les visites qu’il rendit à Collantine, de luy faire quelque lecture ; mais elle estoit tousjours en garde de ce costé-là. Ce n’est pas qu’elle eust de l’aversion pour ses ouvrages, mais c’est qu’elle avoit tant d’autres papiers à lire, où elle prenoit plus de goust, qu’elle n’avoit de loisir que pour ceux qui flattoient sa passion. Un jour entr’autres, qu’il avoit fait plusieurs tentatives inutiles, il se mit tellement en colere contre elle, qu’il estoit presque resolu de la lier, et de luy mettre un baillon dans la bouche pour avoir sa revanche, et la prescher tout à loisir, quand voicy qu’il survient une nouvelle occasion de procès.

Je ne sçay sur quel point de conversation ils estoient, quand la demoiselle luy dit : À propos, j’ay une priere à vous faire : faites-moy le plaisir de me prester une chose que vous trouverez dans l’estude de feu monsieur vostre pere. Quoy (dit Charroselles), avez-vous besoin de livres de guerre ou de chevalerie ? J’ai les fortifications d’Errart77, de Fritat, de de Ville78, et de Marolois79 ; j’ay les livres de machines de Jean Baptiste


77. On a de J. Errart, le premier ingénieur françois qui ait écrit sur cette matière : La fortification démonstrée et réduicte en art, 1594, in fol. — Une autre édition en fut donnée à Cologne en 1604.

78. Son traité, imprimé à Lyon en 1638, a pour titre : Les fortifications du chevalier A. De Ville.

79. Samuel Marolois, de qui l’on a aussi des travaux sur la perspective et sur l’optique, a laissé : Artis muniendi, sive fortificat. pars prima et secunda, Amst., 1633, in-fol. — Son nom ne se trouve dans aucune biographie.