Page:Furetière - Le Roman bourgeois.djvu/13

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ces deux témoignages, rapprochés de la dernière phrase de la lettre de Bussy9, et de l’approbation de Bossuet10, sont la meilleure caution de Furetière et sa véritable oraison funèbre.

Lui mort, ses ennemis s’empressèrent de profiter de l’avantage vulgaire acquis au dernier qui parle. Dans le mois même où il mourut (mai 1688), Tallemant l’aîné adressa, sous forme de lettre, au Mercure, une relation où, avec le ton d’une feinte impartialité, il reproduit contre Furetière les charges dont il s’étoit défendu dans ses factums11. La lettre de Douja, le libelle de Charpentier, circulèrent de nouveau. Puis, afin qu’il n’y eût plus à y revenir, et de peur apparemment que l’écrivain ne survécût à l’homme déshonoré, la conspiration du silence s’organisa peu à peu autour de sa mémoire. La Chapelle, qui lui succéda à l’Académie, esquiva par une


9. « Je diray quand j’en seray persuadé que ce sont deux hommes de mérite (La Fontaine et Benserade) qui ont fait une injustice à un homme d’honneur et d’esprit. Voilà comme je parle toujours, amy de la vérité préférablement à tout le monde, et vous me devez croire aussy quand je vous asseure que je suis sincèrement votre très humble et très obéissant serviteur.

Bussy-Rabutin. »

10. « Bossuet blâma les meneurs de cette affaire… Il daigna informer Furetière que, si la chose dépendoit de lui seul, que s’il étoit chancelier, il lui accorderoit cent priviléges pour un, et il le combla d’éloges sur la beauté de son travail. Cependant, plus tard, quand l’honneur et l’existence même de la compagnie eurent été engagés par l’imprudente vivacité de Furetière, il engagea le chancelier à employer son autorité pour le réduire au silence. » (Francis Wey, Revue contemporaine.)

11. Louis XIV refusa de consentir à ce que Furetière fût