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NOTES DU LIVRE III.

prouvé que César et d’autres capitaines de l’antiquité en ont fait usage.

« Il n’y a que deux moyens d’assurer le siége d’une place : l’un, de commencer par battre l’armée ennemie chargée de couvrir cette place, l’éloigner du champ d’opérations, et en jeter les débris au delà de quelque obstacle naturel, tel que des montagnes ou une grande rivière ; ce premier obstacle vaincu, il faut placer une armée d’observation derrière cet obstacle naturel, jusqu’à ce que les travaux du siége soient achevés, et la place prise. Mais, si l’en veut prendre la place devant une armée de secours, sans risquer une bataille, il faut être pourvu d’un équipage de siége, avoir ses munitions et ses vivres pour le temps présumé de la durée du siége, et former ses lignes de contrevallation et de circonvallation en s’aidant des localités, telles que hauteurs, bois, marais, inondations. N’ayant plus alors besoin d’entretenir aucunes communications avec les places de dépôt, il n’est plus besoin que de contenir l’armée de secours ; dans ce cas, on forme une armée d’observation qui ne la perd pas de vue, et qui, lui barrant le chemin de la place, a toujours le temps d’arriver sur ses flancs ou sur ses derrières, si elle lui dérobait une marche. En profitant des lignes de contrevallation, on peut employer une partie du corps assiégeant pour livrer bataille à l’armée de secours. Ainsi, pour assiéger une place devant une armée ennemie, il faut en couvrir le siége par des lignes de circonvallation. Si l’armée est assez forte pour qu’après avoir laissé devant la place un corps quadruple de la garnison, elle soit encore aussi nombreuse que l’armée de secours, elle peut s’éloigner de plus d’une marche ; si elle reste inférieure après ce détachement, elle doit se placer à une petite journée de marche du siége, afin de pouvoir se replier sur les lignes, ou bien recevoir du secours en cas d’attaque. Si les deux armées de siége et d’observation ensemble ne sont qu’égales à l’armée de secours, l’armée assiégeante doit tout entière rester dans les lignes ou près des lignes, et s’occuper des travaux de siége, pour le pousser avec toute l’activité possible.

« Feuquières a dit qu’on ne doit jamais attendre son ennemi dans les lignes de circonvallation, et qu’on doit en sortir pour l’attaque. Il est dans l’erreur ; rien ne peut être absolu à la guerre, et on ne doit pas proscrire le parti d’attendre son ennemi dans les lignes de circonvallation.

« Ceux qui proscrivent les lignes de circonvallation et tous les secours que l’art de l’ingénieur peut donner, se privent gratuitement d’une force et d’un moyen auxiliaire qui ne sont jamais