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LES STRATAGÈMES. LIV. IV.

plus grande effervescence, et fit frapper de la hache les chefs de la révolte. Peu de temps après les soldats licenciés, ayant sollicité auprès de lui et obtenu leur réintégration, se montrèrent dès lors irréprochables.

3. Au moment où Postumius, personnage consulaire, exhortait ses soldats, ils lui demandèrent ce qu’il exigeait d’eux : « Suivez-moi, » leur dit-il ; et, saisissant une enseigne, il s’élança le premier contre l’ennemi. Ses troupes le suivirent et remportèrent la victoire.

4. Cl. Marcellus étant tombé, sans s’y attendre, entre les mains des Gaulois, tourna avec son cheval, cherchant par où il pourrait s’échapper ; mais, se voyant investi de toutes parts, il adressa une prière aux dieux, et s’élança au milieu des ennemis, les frappa d’étonnement par son audace, tua leur chef, et remporta des dépouilles opimes, lorsqu’il avait à peine l’espoir de se sauver.

5. L. Paullus, à la bataille de Cannes, voyant l’armée perdue, refusa le cheval que lui offrait Lentulus pour fuir, et ne voulut pas survivre à ce désastre, bien qu’on ne pût le lui imputer à lui-même. Épuisé par ses blessures, et appuyé contre une pierre, il resta en cet état jusqu’à ce qu’il expirât sous les coups des ennemis.

6. Varron, son collègue, montra encore plus de résolution, en conservant sa vie après ce malheur ; et le peuple, ainsi que le sénat, lui rendit des actions de grâces pour n’avoir pas désespéré de la république. Au reste, toute sa conduite ultérieure prouva qu’il s’était conservé, non par désir de vivre, mais par amour pour la patrie : car il laissa croître sa barbe et ses cheveux, et ne se coucha plus pour prendre ses repas. Il refusa même les dignités qui lui étaient conférées par le peuple, disant qu’il fallait à la république des magistrats plus heureux que lui.