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LES STRATAGÈMES. LIV. II.

24. Comme le lac de Thrasymène était séparé du pied d’une montagne par un chemin étroit qui conduisait dans le plat pays, Annibal, simulant une retraite, franchit le passage et alla camper dans cette plaine ; ensuite il embusqua des troupes, pendant la nuit, sur une colline qui dominait le défilé, et sur les côtés du chemin ; et, au point du jour, profitant d’un brouillard qui le cachait, il rangea en bataille le reste de son armée. Flaminius, qui croyait l’ennemi en fuite, se mit à le poursuivre, s’engagea dans le défilé, et n’aperçut le piége qu’au moment où, attaqué à la fois de front, en flanc et par derrière, il périt avec toute son armée.

25. Le même Annibal, ayant en tête le dictateur Junius, donna l’ordre à six cents cavaliers de se partager en plusieurs petites troupes, et d’aller, à la faveur de la nuit, alternativement et sans interruption, se présenter autour du camp de l’ennemi. Ainsi harcelés pendant la nuit entière, les Romains gardèrent leurs retranchements sans quitter leurs armes, battus par une pluie continuelle ; et quand, accablés de fatigue, ils eurent reçu de Junius l’ordre de se retirer, Annibal, sortant de son camp avec des troupes fraîches, s’empara de celui du dictateur.

26. Un semblable artifice réussit à Épaminondas, général thébain, contre les Lacédémoniens, qui avaient creusé des fossés à l’isthme de Corinthe, pour défendre l’entrée du Péloponnèse. Pendant toute la nuit il inquiéta l’ennemi avec quelques troupes légères, qu’il rappela vers la pointe du jour ; et, quand les Lacédémoniens se furent aussi retirés, il fit soudainement avancer toute son armée, qui avait pris du repos, et fit irruption par les fossés mêmes, restés sans défense.

27. Annibal, ayant rangé son armée en bataille près de Cannes, fit passer du côté des Romains six cents cavaliers numides, qui, pour inspirer moins de mé-