Page:Frontin - Les Stratagèmes - Aqueducs de la ville de Rome, trad Bailly, 1848.djvu/145

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
143
LES STRATAGÈMES. LIV. II.

avant. Ainsi attirés sur le lieu de l’embuscade, ils furent taillés en pièces et mis en fuite.

11. Leptine, commandant l’armée des Syracusains contre les Carthaginois, fit aussi ravager son propre pays, et brûler des maisons de campagnes et quelques châteaux. Les Carthaginois, croyant que c’était l’œuvre des leurs, sortirent du camp pour les soutenir, et tombèrent dans une embuscade, où ils trouvèrent leur défaite.

12. Maharbal, envoyé de Carthage contre les Africains révoltés, et connaissant le goût passionné de ce peuple pour le vin, mélangea une grande quantité de cette boisson avec du suc de mandragore, plante qui tient le milieu entre le poison et les narcotiques ; et après un léger engagement avec l’ennemi, il se replia à dessein : puis, au milieu de la nuit, laissant dans son camp quelques bagages et tout le vin mélangé, il feignit de s’enfuir. Les barbares s’emparent de son camp, se livrent à la joie, boivent avidement ce vin pernicieux, et bientôt, étendus à terre comme s’ils étaient morts, ils sont, au retour de Maharbal, tous pris ou massacrés.

13. Annibal, sachant que son camp et celui des Romains étaient dans un lieu où le bois manquait, abandonna de nombreux troupeaux de bœufs dans ses retranchements, au milieu de ce pays désert. Les Romains s’emparèrent de ce butin, et, se trouvant dans une grande disette de bois, se gorgèrent de viande mal cuite. Tandis qu’ils se croyaient en sûreté, et qu’ils étaient incommodés par cette viande à demi crue, Annibal ramena son armée pendant la nuit, et leur fit beaucoup de mal.

14. En Espagne, Tiberius Gracchus, informé que l’ennemi, ne pouvant se procurer des vivres, était dans la détresse, abandonna son camp, où il laissa en abon-