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ET SUR SES ÉCRITS.

de la géographie. Mais la plupart de ces fautes sont si grossières, qu’on ne peut raisonnablement les attribuer qu’à l’ignorance des copistes, gens qui n’ont épargné à notre auteur ni omissions, ni transpositions, ni interpolations. C’est ce que n’a pas observé Schœll[1], quand il a prétendu que l’ouvrage qui nous occupe était « une compilation faite avec assez de négligence, surtout dans la partie historique. »

À ce jugement d’un érudit, nous opposerons avec confiance celui d’un savant[2] : « Un contemporain des deux Pline, Jules Frontin composa quatre livres de stratagèmes militaires : c’est un tissu d’exemples fournis par les grands capitaines grecs, gaulois, carthaginois, romains, et qui correspondent aux différentes branches de l’administration et de la direction des armées. L’art de cacher ses entreprises et de découvrir celles de l’ennemi, de choisir et de disputer les postes, de dresser des embûches et d’y échapper, d’apaiser les séditions et d’enflammer le courage, de se ménager les avantages du temps et du lieu, de ranger les troupes en bataille et de déconcerter les dispositions prises par son adversaire, de dissimuler ses propres revers et de les réparer ; l’habileté nécessaire dans les retraites, dans les assauts, dans les siéges, dans le passage des fleuves, dans les approvisionnements ; la conduite à tenir à l’égard des transfuges et des traîtres ; enfin le maintien de la discipline, et la pratique des plus rigoureuses vertus, justice, modération et constance, au sein des camps, des combats, des désastres et des triomphes : tel est le plan de ce recueil. On a douté aussi de son authenticité ; mais Poleni a exposé les raisons de croire que Jules Frontin l’a réellement rédigé sous le règne de Domitien. Dans tous les cas, il serait fort préférable à celui de Valère Maxime, et par la méthode, quoiqu’elle ne soit pas toujours parfaite, et par la précision des idées, et surtout par le choix des faits. C’est l’ouvrage d’un bien meilleur esprit : en général, Frontin puise aux sources historiques les plus recommandables ; et lorsqu’il ajoute quelques notions à celles que renferment les grands corps d’annales, elles sont claires, instructives, propres à compléter ou à enrichir l’histoire militaire de l’antiquité. »

Le recueil des Stratagèmes, malgré quelques récits invraisemblables et même absurdes qu’il renferme, et dont la plupart

  1. Hist. abr. de la litt. rom., t. ii, p. 454.
  2. Daunou, Cours d’études d’hist., t. Ier, p. 431.