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LES STRATAGÈMES. LIV. II.

15. M. Antoine, ayant affaire aux Parthes, qui accablaient son armée d’une grêle de flèches, ordonna à ses soldats de s’arrêter et de former la tortue. Les traits glissèrent par-dessus, et l’ennemi s’épuisa en vains efforts contre les Romains.

16. Annibal, ayant à combattre Scipion en Afrique, avec une armée composée de Carthaginois et d’auxiliaires, parmi lesquels étaient des soldats de diverses nations, même des Italiens, avait mis devant son front de bataille quatre-vingts éléphants, pour jeter le désordre dans l’armée ennemie, et derrière eux les auxiliaires gaulois, liguriens, baléares et maures. Ces troupes, qui ne pouvaient prendre la fuite parce que les Carthaginois se tenaient derrière elles, devaient, sinon faire éprouver des pertes aux ennemis, du moins les harceler. Les Carthaginois formaient la seconde ligne, pour tomber, encore frais, sur les Romains déjà fatigués. En dernier lieu venaient les Italiens, dont Annibal suspectait la fidélité et le courage, attendu que la plupart avaient été amenés malgré eux de leur pays. À cette ordonnance de bataille, Scipion opposa ses formidables légions, qu’il rangea sur trois lignes, hastats, princes et triaires ; et, au lieu de les disposer par cohortes entières, il laissa entre les manipules des intervalles par lesquels les éléphants, poussés par l’ennemi, devaient franchir les lignes sans rompre les rangs. Afin que l’armée ne présentât pas de vides, ces intervalles étaient remplis par des vélites armés à la légère, auxquels on avait ordonné de se retirer, soit en arrière, soit de côté, à l’approche des éléphants. Enfin la cavalerie était répartie entre les deux ailes : à droite celle des Romains, sous les ordres de Lélius ; à gauche celle des Numides, commandée par Masinissa. Ce fut sans doute à cette sage disposition que Scipion dut la victoire.