Page:Frondaie - L'Homme à l'Hispano - 1925.djvu/303

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
292
l’homme à l’hispano

qu’arrive-t-il ? Ici, un grand seigneur, un amant trop heureux, s’écroule dans le cœur d’une femme. Il y meurt. Et quelque part, n’importe où, survit un pauvre bougre, foutu, cassé, un rien du tout inutile, désespéré et que personne ne connaît plus… Au contraire, si, dans un coin j’assassine ce pauvre bougre…

Il conclut :

— Aujourd’hui, vous savez, la mort d’un homme…

Il pensait à tous ceux qu’il avait vus tomber pour une idée, à ces sacrifiés qui avaient donné leur vie pour défendre ce qu’ils n’ont pas, aux romanesques qui meurent pour des drapeaux, aux ambitieux qui vont au martyre pour rester dans l’histoire fragile des hommes…

— Tais-toi, cria Montnormand avec révolte. Toute fin humaine est la fin d’un monde.

Dewalter répondit :

— Mais oui… pas plus : l’étoile filante !

Il se mit debout et, soudain, il fut net, précis :

— Nous sommes deux en moi : celui que je suis et celui que j’ai voulu être. Il faut qu’un des deux disparaisse.

— Sois courageux, tue l’autre, cria encore Montnormand.

— Non, répondit-il. Il est trop beau.

Son ami recula. Il le voyait si beau, en effet,