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l’homme à l’hispano

son qu’il possédait encore à Poissy, déjà une fois hypothéquée, la maison natale, dont les loyers payaient tout juste les frais et qu’il conservait par souvenir, se disant, sans se le formuler, que, dans cette maison, sa mère avait aimé, Ensemble, ils avaient évoqué des souvenirs et Georges avait compris que ce vieillard restait son seul ami. Il s’était senti heureux d’être tutoyé par lui. Montnormand lui avait remis ses quatre sous, lui prédisant que, là-bas, la destin lui serait meilleur… Il n’y avait pas deux mois ! Le notaire se rappelait son visage sans gaieté, mais calme, beau, rayonnant d’une énergie sereine. Il y songeait dans le salon et, quand Georges entra, il eut un geste de désolation.

Il voyait un être traqué, affaibli, touché par la douleur comme par une arme, un malade. Depuis quarante heures, il avait, d’un seul coup, laissé paraître ses angoisses intérieures, toujours cachées à Stéphane par un miracle de volonté. Elles étaient sorties. Leurs stigmates le marquaient. Sa fièvre, obscure pendant des jours, flambait. Dans ses yeux, on en voyait l’incendie. Dans sa chambre, il avait maigri. Il n’était pas rasé. L’énergie d’autrefois, la douleur d’hier, avaient fait place à une expression de lassitude nerveuse, comme celle des joueurs qui ont tout joué et qui ont perdu. Son haleine était chaude, il avait soif.

Il sourit à son vieil ami, sans oser s’approcher de lui. Enfin, il lui dit :