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L’HOMME À L’HISPANO

bien démontré à Georges. Ils étaient dans la pâtisserie de Saint-Jean-de-Luz et, au dehors, un chanteur de la rue chantait dans l’espoir d’une aumône. À certaines minutes, les amants les plus raffinés ne sont pas difficiles : le chanteur avait plu à Stéphane. Elle dit de lui donner quelque obole et Georges le fit aussitôt. Alors, tout au plaisir que lui causait la chanson, elle avait évoqué un souvenir :

— Je me rappelle, avait-elle dit, un chanteur de Taormine. J’étais là-bas, avec ma mère et lord Crawe…

Georges connaissait le nom. Pour s’assurer qu’il s’agissait bien du fameux Anglais, célèbre pour ses recherches d’archéologie, il interrogea :

— Le collectionneur ?

— Oui, continua Stéphane… Il avait, ce chanteur, une voix de ciel. Je lui ai donné cinq cents francs et pendant une heure, pour moi, il a chanté. Quand nous irons en Italie, nous le retrouverons peut-être. Et, pour nous deux, il chantera…

Elle parlait légèrement, contente, et l’idée lui était extraordinairement simple de payer un chanteur des rues le prix d’un artiste de théâtre. Pourtant, dans sa noblesse naturelle et son respect de l’amour, elle avait toujours eu la hantise d’être exposée à une duperie sentimentale et recherchée pour sa fortune. La force d’Oswill, quand il avait obtenu sa main, avait peut-être