« Mon père, dit-elle sur un ton d’inflexible audace, j’ai besoin d’être seule un moment avec M. de Bray. »
M. d’Orsel se leva sans hésiter, embrassa paternellement sa fille et sortit.
« Vous partez demain, me dit Madeleine en me parlant debout, et j’étais debout comme elle.
— Oui, lui dis-je.
— Et nous ne nous reverrons jamais ! »
Je ne répondis pas.
« Jamais ! reprit-elle ; entendez-vous ? Jamais. J’ai mis entre nous le seul obstacle qui puisse nous séparer sans idée de retour. »
Je me jetai à ses pieds, je pris ses deux mains sans qu’elle y résistât ; je sanglotais. Elle eut une courte faiblesse qui lui coupa la voix ; elle retira ses mains, et me les rendit dès qu’elle eut repris sa fermeté.
« Je ferai tout mon possible pour vous oublier. Oubliez-moi, cela vous sera plus facile encore. Mariez-vous, plus tard, quand vous voudrez. Ne vous imaginez pas que votre femme puisse être jalouse de moi, car à ce moment-là je serai morte ou heureuse, ajouta-t-elle avec un tremblement qui faillit la renverser. Adieu. »
Je restai à genoux, les bras étendus, attendant