Page:Froissart - Poésies (1829).djvu/311

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
295
DE JEAN FROISSART.

Soie merci ! moult doucement ;
Et si me demanda comment
J’avoie fait en ce voiaige,
Et je li di : « Ma dame, s’ai-je
» Pour vous éu maint souvenir ; »
» — Pour moi ! Voire ! Et dont poet venir ?
» — De ce, dame, que tant vous aim
» Qu’il n’est heure, ne soir ne main,
» Que je ne pense à vous tout dis ;
» Mès je ne sui pas bien hardis
» De vous remonstrer, dame chiere,
» Par quel art ne par quel maniere
» J’ai éu ce commencement
» De l’amourous atouchement. »
Et ma dame lors me regarde ;
Un petit rit, et puis me tarde
Son regard ; et aillours le met.
D’autres parolles s’entremet
De parler à la damoiselle
Qui dalès moi estoit. Dist elle :
« Ce jone homme qui siet yci
» N’est pas empirés ! Dieu merci,
» Ens ou voiaige qu’il a fait. »
Et la damoiselle à ce fait
Respondit : « Diex en soit loés !
Dist elle, « il fault que vous oés
» Un virelay plaisant et bel
» Qu’il a fait de là tout nouvel
» Dont vous estes matere et cause. »
Lors me requist sans mettre y pause