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DE JEAN FROISSART.

Ne fu com moi la belle trette
Pour quelle amour ce dittié trette ;
Je m’en sçai bien à quoi tenir.
Or voeil au pourpos revenir
Dont je parloïe maintenant.
Il est vrai que tout en riant,
Quant ce vint là au congié prendre,
La belle, où riens n’a que reprendre,
Me dist moult amoureusement :
« Revenés-nous, car vraiement
» À vostre lire prenc plaisir ;
» Je nen vodroïe defallir. »
— « Belle, dis-je, pour nulle rien. »
Hé mi ! que ce me fist de bien !
Car, quand venus fui à l’ostel,
Je me mis en un penser tel
Qui onques puis ne me falli.
J’oc bien cause qui m’assalli ;
La beauté de la belle et bonne
Di-je. J’ai esté à Nerbonne,
Chercié la France et Avignon,
Mès je ne donroie un ongnon
De tous les voiages qu’ai fais
Vers cesti. Or sui-je parfais,
Ne onques nuls homs ne fu si.
Poroit-il jamès estre ensi
Que elle me dagnast amer ?
Ne l’en oseroïe parler ;
Car si je l’en parloïe, voir
Tel chose se poroit mouvoir