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DE JEAN FROISSART.

Car tout mon fait entirement ordonne.
S’en regrasci Amours, quant il me donne ;
Avec les mauls qu’il me convient porter,
Cognissance de moi reconforter,
Et que tout dis, tant qu’à ceste matire ;
Au plus joieus mon coer se tret et tire ;
Car tout ensi comme j’ai dit devant,
Je ne poroie aler non plus avant
En cel estat, ne moi amoderer,
Quant tous mes fès voeil bien considerer ;
Comme poroit une grosse rivière
Venant d’amont prendre son cours arrière ;
Se ce n’estoit la douce souvenance
Que j’ai de vous, ma dame, et la plaisance
Qui en pensant à vous me rejoist,
Et grandement me conforte et nourist,
Et me pourvoit de conseil et d’aye
Que je ne crienc assaut ne envaye
Que fortune me puist donner ne faire.
Et c’est raisons ; car en vo noble afaire,
Et en la grant discrétion de vous,
En vo maintien, qui tant est beaus et dous,
On n’i voit riens qui face à amender ;
Car vous estes sans moyen et sans per
Ceste qui est toute dame de moi.
Ensi le jur loyalment, par ma foy !
Ce n’est pas fort se vous m’avés conquis ;
Mès ce seroit pour moi uns grant deduis
Se regarder en pité me dagniés,
Et se mes mauls telement adagniés