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DE JEAN FROISSART.

Par quoi il puisse faire par rieule aler
Séurement l’oevre de Doulc-Parler.
Sans ce ne poet sagement descouvrir
Ce qu’il li fault, ne sagement ouvrir,
Ensi qu’il a-pertient et que requiert
L’estat d’amours, tout tel que l’amant quiert.
Et quand Discretions à ce l’ordonne,
Lors Doulc-Penser à sa droite heure sonne,
Et divers chans amoureusement chante,
Des quel il troeve en soi plus de soissante.
Une heure en la presensce de sa dame
Chante comment il est souspris, sus s’ame ;
Si qu’il convient qu’à contenance faille ;
Et puis Amours une aultre heurre li baille.
Tout seul à lui méismes ses proyères
Chante, et ordonne en diverses manières ;
Et puis moult bien li avient une aultre heure,
Quant Doulc-Parler pour soi aidier labeure
Que, pour sa dame esmouvoir à pité,
Ses requestes plainnes d’umilité
Ordonne, et dist au mieulz qu’il scet et poet,
Ensi que cils qui grasce acquerre voet ;
Et l’autre heure, sans ce c’on le confort,
Chante chançons de très joieus confort
Et de très grant consolation voir ;
Et l’aultre heure ne pora el mouvoir,
Fors chanter chans tous garnis de tristrece
Plains de soussis et tous vuis de liece,
Et complaintes vives et dolereuses,
Souspirs, regrès, matères languereuses,