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POÉSIES

Et li donnent d’esperance matère ;
Car quant li vrais amoureus considère
Qu’il est loyal en s’amour, et sera,
Et pacient, et qu’il persevera
À son pooir très diligentement,
Et se vodra très honnourablement
Estre courtois, larges et bien celans,
Et si sera, s’il poet, preus et vaillant
Tant qu’il ara bon renon et bon los ;
S’il se sent tels, devant tous dire l’os,
Il ne se doit pas doubter, par raison,
Qu’il n’ait merci en aucune saison.
Ensi se fourme en son coer espérance ;
Et quant il r’a d’autre part cognissance,
Et qu’il perçoit que sa dame honnourable
A doulc semblant et regart amiable,
Et se le troeve aussi, quant il s’avance
De bel accoeil et de belle accointance,
Et qu’envers vous volentiers s’umelie,
Et s’est aussi jone, joieuse et lie,
Il doit penser et croire, sans doubtance,
Qu’Amours y a grant part et grant puissance,
Et qu’assés tos elle seroit encline
À bien amer, lors que par sa doctrine
Amours à ce le feroit esmouvoir,
Et que Venus li feroit concevoir
Que la vie est delitable et séure ;
Qu’il a ami de manière méure,
Sage et celant, et si bien avisé
Comme il vous est ci devant devisé.