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DE JEAN FROISSART.

Que si m’esmoet le coer, au dire oir,
Que je ne puis parfette joie avoir ;
Car Plaisance et Beauté me representent
Les biens de vous, et dedens mon coer entent
L’ardant desir qui nuit et jour m’esveille.
Dont, en pensant à ce, je m’esmerveille
Et esbahis, en la mienne pensée,
Où tel beauté poet estre compassée,
Et di en moi : Je croi onques Nature,
Ne fourma voir si belle créature
Que vous estes, dame de tous biens plainne.
Vostre beauté qui est la souverainne
De trestoutes celles que onques vi
M’a plainnement si pris et si ravi,
Et sa vertu si mon coer à li tire,
Que je ne sçai que je doi faire ou dire,
Car Plaisance trop bien à lui s’accorde
Qui remonstrée est par la propre corde
Que le plonk tire, et dont il fait mouvoir
La mère roe. Ensi m’est-il pour voir ;
Et par ce sui telement atirés
Que mon coer est entirement tirés
En vrai desir ; et tout par la puissance
Et l’accord de Beauté et de Plaisance
Qui plainnement en ce desir me tirent,
Dont tout mi sen-tement el ne desirent
Que mon desir une partie sente
De ce grant bien que Beauté li présente.
Et pour ce que ceste roe premiere
A de mouvoir ordenance et manière