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À M. KITTREDGE

En dépit de l’apparence, le troisième argument de M. Kittredge n’est pas plus solide que les autres, car, dans l’énumération que renferme le Joli buisson de jonece, Froissart a certainement voulu parler, non point de toutes ses œuvres rimées, mais seulement des « traités amoureux et de moralité », c’est-à-dire des seules compositions métriques que Froissart rangeât d’ordinaire en son bagage poétique et dont la réunion constitue précisément les deux recueils de poésies de notre auteur que la Bibliothèque nationale conserve sous les nos 830 et 831 du fonds français[1]. Et ce n’est pas là de ma part une simple affirmation. Froissart n’a eu garde, en effet, de nommer, parmi les poèmes composés par lui antérieurement à 1373, cette chronique rimée que, tout jeune encore, en 1361 sans doute, il offrit à la reine d’Angleterre Philippe, comme il le dit expressément en la seconde rédaction de ses Chroniques[2],


987 Tangis et Camels de Camois
988 Sont la ensus dedens ces bois.
991 Et des dames y est Helainne
Et de Vregi ta chastelainne,
Genoivre, Yseut et belle Hero,
Polyxena et dame Equo ;
995 Et Medée, qui tient Jason,
Vois tu la dessous ce buisson.

  1. Le ms. 830 débute ainsi : « A sçavoir est que dedans ce livre sont contenu pluiseurs trettiés amoureus et de moralité, lesquels ont esté fait… par… sire Jehan Froissart… » Et à l’explicit du ms. 831, on lit ce qui suit : « Explicit dittiers et traittiers amoureus et de moralité, fais… par… sire Jehan Froissart. »
  2. « Si ay tousjours a mon pouoir justement enquis et demandé du fait des guerres et des aventures qui en sont avenues, et par especial depuis la grosse bataille de Poitiers ou le noble roy Jehan de France fut prins, car devant j’estoie jeune de sens et d’aage. Et ce non obstant si emprins je assez hardiement, moy issu de l’escolle, a dittier et a rimer les guerres dessus dites et porter en Angleterre le livre tout compilé, si comme je le fis. Et le presentay adonc a tres haulte et tres noble dame, dame