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À M. KITTREDGE

effet, l’emploi du temps de notre auteur, ou plus exactement, l’énoncé de ses déplacements, de ses voyages, durant cette période. La composition d’un roman de 34000 vers, dit-il, exige non seulement beaucoup de temps, mais aussi quelque lecture. Je ne le méconnais point, mais ici encore le raisonnement de M. Kittredge ne me semble pas absolument probant. Et puis, contrairement à ce que pense mon adversaire, je persiste à croire que le poème publié par moi constitue la seconde rédaction de Meliador et qu’en sa forme première cet ouvrage était sensiblement moins étendu[1].

Les arguments que je viens de résumer et de discuter aussi brièvement que possible ne reposent visiblement que sur des hypothèses. Il peut sembler a priori que le troisième argument de M. Kittredge ruine absolument ma manière de voir au sujet de Meliador. Dans un poème allégorique terminé en novembre 1373, le Joli buisson de jonece, Froissart énumère les poèmes précédemment composés par lui, dans l’ordre où ils ont paru :


443 Voirs est qu’un livret fit jadis
Qu’on dist l’Amourous Paradys,
445 Et aussi celi de l’Orloge
Ou grant part de l’art d’amours loge ;
Après, l’Espinette Amoureuse,
Qui n’est pas a l’oïr ireuse,
Et puis l’Amoureuse prison,
450 Qu’en pluisours places bien prise on ;
Rondeaus, balades, virelais
Grant foison de dis et de lays[2]
 

  1. J’ai dit au tome Ier de Meliador (p. l) que la rédaction primitive de ce roman, représentée par A, ne paraît pas avoir compris l’important épisode d’Agamanor travesti en peintre ; or, cet épisode et ses conséquences ne donnent pas matière à moins de 3372 vers (19680 à 23052).
  2. Œuvres de Froissart, édition de l’Académie royale de Belgique, t. II des Poésies, p. 14.