Page:Froissart - Méliador, tome 3.djvu/114

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
109
Méliador

25460 « Et se j’ay parlé rudement,
« Sire, qu’il me soit pardonné. »
Dist li chevaliers : « En nom Dé,
« Pardonné vous soit il en l’eure.
« A Dieu, a Dieu, trop je demeure.
25465 « Vous me tenés ci de paroles
« Qui me sont .i. petit trop moles ;
« Bien les vosisse aultres oïr. »
— « Queles ? » dist Dagor, qui desir
Eut de savoir s’entention.
25470 — « Que vous, par bonne affection,
« Vous mesissiés en ordenance
« Pour jouster a .i. fier de lance. »
Respont Dagor qui ot grant joie :
« Se cest afaire refusoie,
25475 « J’en vaudroie mains en tous cas.
« Or vous metés a point, car pas
« Ne partirés sans une jouste,
« A cui qui vaille ne qui couste. »



A ces mos se sont eslongié,
25480 Quant de jouster ont pris congié ;
Puis s’en viennent de plains eslais,
Ensi que requierent li fais,
Les chevaus en esporonnant f. 188 a
Par chevalereus couvenant ;
25485 Si se fierent sus les escus
Des lances as bons fers agus.
Telement se sont encontré
Et li un dedens l’autre entré
Que les lances en tronçons volent,
25490 Mais de ce cop point ne s’afolent,
Ne ne mehagnent, ne ne blecent,
Ne de nulle riens ne s’empecent ;
Oultre s’empassent vaillanment.