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ii
Introduction

chansons, ballades, rondeaulx et virelais que le gentil duc fist en son temps ; lesquelles choses, parmy l’imagination que j’avoie de dittier et de ordonner le livre, le conte de Fois vit moult voulentiers. Et toutes nuits après souper, je luy en lisoie, mais en lisant nulluy n’osoit sonner mot, ne parler, car il vouloit que je fuisse bien entendu[1].

Froissart est un peu plus explicite dans le Dit du Florin :

291Car toutes les nuis je lisoie
Devant lui et le solaçoie
D’un livre de Melyador,
Le chevalier au soleil d’or,
295Le quel il ooit volentiers,
Et me dist « C’est un beaus mestiers,
« Beaus maistres, de faire tels choses. »
Dedens ce romanc sont encloses
Toutes les chançons que jadis,
300Dont l’ame soit en paradys,
Que fist le bon duc de Braibant,
Wincelaus dont on parla tant ;
Car uns princes fu amourous,
Gracïous et chevalerous,
305Et le livre me fist ja faire
Par tres grant amoureus afaire,
Comment qu’il ne le veïst onques.
Après sa mort je fui adonques
Ou pays du conte de Fois,
310Que je trouvai larghe et courtois,
Et fui en revel et en paix
Près de trois mois dedens Ortais,
Et vi son estat, grant et fier,

  1. Œuvres de Froissart, édition de l’Académie royale de Belgique, tome XI des Chroniques, p. 85.