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LIVRE I. — PARTIE II.

nous ne doivent être baillées. Sur lesquelles choses, après plusieurs altercations eues sur ce, et par espécial pour ce que les dites renonciations ne se font pas de présent, avons finablement accordé avec notre dit frère par la manière qui s’ensuit : c’est à savoir, que nous et notre dit ains-né fils renoncerons, et ferons et avons promis à faire les renonciations, transports, cessions et délaissemens dessus dits quand et si très tôt que notre dit frère aura baillé à nous ou à nos gens, espécialement de par nous députés, la cité et le châtel de Poitiers, et toute la terre et le pays de Poitou ; ensemble le fief de Touars et la terre de Belleville ; la cité et le châtel d’Agen, et toute la terre et le pays d’Agénois ; la cité et le châtel de Pierregord, et toute la terre et le pays de Pierreguis ; la cité et le châtel de Caours, et toute la terre et le pays de Quersin ; la cité et le châtel de Rodais, et toute la terre et le pays de Rouergue ; la cité et le châtel de Saintes, et toute la terre et le pays de Xaintonge ; le châtel et la ville de la Rochelle, et toute la terre et le pays de Rochelois ; la cité et le châtel de Limoges, et toute la terre et le pays de Limousin ; la cité et le château d’Angoulême, et toute la terre et le pays d’Angoulémois la terre et le pays de Bigorre, la terre de Gaure, le comté de Ponthieu et le comté de Guines. Lesquelles choses notre dit frère nous a promises à bailler, en la forme que ci-dessus est contenu, ou à nos espéciaux députés, dedans un an en suivant, lui parti de Calais pour retourner en France. Et tantôt ce fait, devant certaines personnes que notre dit frère députera, nous et notre dit ains-né fils ferons en notre royaume d’Angleterre icelles renonciations, transports, cessions et délaissemens, par foi et par serment solennellement ; et d’icelles ferons bonnes lettres ouvertes, scellées de notre grand scel, par la manière et forme comprise en nos autres lettres sur ce faites, et que compris est au dit traité ; lesquelles nous envoierons à la fête de l’Assomption Notre-Dame prochainement en suivant, en l’église des Augustins en la ville de Bruges, et les ferons bailler à ceux que notre dit frère y envoiera lors pour les recevoir. Et si dedans le terme qui mis y est, notre dit frère ne pouvoit bailler, ni délivrer aisément à nous ou à nos députés les cités, villes et châteaux, lieux forteresses et pays ci-dessus nommés, combien qu’il en doive faire son plein pouvoir sans nulle dissimulation, il les nous doit délivrer et bailler dedans le terme de quatre mois en suivant l’an accompli. Avecques toutes ces choses et autres qui s’ensuivront ci-après, est dit et accordé par la teneur du traité que nous, renvoyé ou ramené notre dit frère de France en la ville de Calais[1], six semaines après ce que il y sera venu, nous devons recevoir, ou nos gens à ce espécialement de par nous députés, six cent mille francs, et par quatre ans en suivant, chacun an six mille ; et de ce délivrer et mettre en ôtage, envoyer demeurer en notre cité de Londres, en Angleterre, des plus nobles du royaume de France, qui point ne furent prisonniers en la bataille de Poitiers[2] ; et de dix neuf cités et villes des plus notables du royaume de France, de chacune deux ou trois hommes, ainsi comme il plaira à notre conseil. Et tout ce accompli, les ôtages venus à Calais et le premier payement payé, ainsi que dit est, nous devons notre dit frère de France et Philippe son jeune fils délivrer quittement en la ville de Boulogne sur mer, et tous ceux qui avecques eux furent prisonniers à la bataille de Poitiers, qui ne seroient rançonnés à nous ou à nos gens, sans payer nulle rançon. Et pour ce que nous savons de vérité que notre cousin messire Jacques de Bourbon, qui fut pris à la bataille de Poitiers, a toujours mis et rendu grand’peine à ce que paix et accord fût entre nous et notre dit frère de France, en quelconque état qu’il soit, rançonné ou à rançonner, nous le délivrerons sans coût et sans frais avecques notre dit frère, en la ville de Boulogne, mais que cil

  1. Cette clause est différemment énoncée dans le traité publié par Rymer et par l’auteur des Chroniques de France. On y lit : Item est accordé que le roi de Franee paiera au roy d’Angleterre trois millions d’écus d’or, dont les deux valent un noble de la monnoie d’Angleterre ; et en seront payés au dit roy d’Angleterre ou à ses députés six cent mille écus à Calais dedans quatre mois à compter depuis que le roy de France sera venu à Calais, et dedans l’an dès lors prochain en suivant en seront payés quatre cent mille écus tels comme dessus, en la cité de Londres en Angleterrs (les Chroniques de France disent : en la dite ville de Calais) ; et dès lorst chacun an prochain en suivant quatre cent mille écus tels comme devant en la dite cité, jusques à tant que les dits trois millions seront payés.
  2. On lit au contraire dans les deux pièces que nous venons de citer : Et seront ôtages tant prisonniers pris à la bataille de Poitiers comme autres.