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Et quand, ne croyant pas encore à cette tombe,
Je chercherai partout ce qui fut la colombe,
Ce qui fut le parfum, ce qui fut le rayon,
Et quand, triste et courbé sur cette vision
Que déjà l’avenir mystérieux me voile,
Je redemanderai cette femme à l’étoile,
À la fleur, à l’oiseau, je ne verrai plus rien
Dans toute la grandeur du monde aérien
Que l’horreur du silence affreux et de la brume
Lamentable, et plus près, tout près de moi, l’écume
Du même flot de mort qui couvrira mes pieds !
Ah ! nos crimes sont trop durement expiés !
Une fatalité pèse sur nos demeures.
Que me restera-t-il, si Dieu veut que tu meures ?
Grand Ange dont le corps superbe est mon orgueil,
Que me restera-t-il, si tu t’en vas ? ô deuil !

Encore, si j’avais la force créatrice
De célébrer ce corps avant qu’il ne périsse
Et de faire, au moyen de mes vers éclatants,
Qu’il soit victorieux de la mort et du temps,
Si je pouvais, avant qu’elle ne m’abandonne,
Lui mettre sur le front ainsi qu’une couronne
Le rajeunissement de l’immortalité,
Je me consolerais de la rapidité