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Quand nous ressurgirons du fond de nos désastres
Comme une rêverie au-dessus d’un ravin,
Abandonnant la terre obscure pour les astres
Et le combat humain pour le combat divin ;

Quand nous déposerons la flamboyante épée
Qui depuis plus d’un siècle ensanglante nos bras,
Rien ne sera fini dans la grande épopée.
Ô bataille des jours anciens, tu renaîtras !

Tu renaîtras, bataille amoureuse et farouche,
Et, foulant nos corps froids et te vautrant dessus,
Tu viendras embrasser avec ta belle bouche
Les fils retentissants que nous aurons conçus.

D’autres enfants naîtront et d’autres jeunes hommes,
Guerriers graves emplis d’un rêve surhumain,
Plus beaux que nous n’étions, plus forts que nous ne sommes,
Qui prendront l’effroyable épée avec leur main,

Et qui se jetteront du fond de leur demeure
Dans la lutte, portant notre âme dans leurs flancs,
Et qui s’acharneront jusqu’à ce qu’elle en meure
Sur la Réalité féroce aux yeux sanglants.