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malades. Ces parents m’avaient appelé, quelques mois auparavant, auprès de leur petite fille chez laquelle s’était produit, à la suite d’un rêve, un phénomène obsessionnel intéressant. Ce cas, dont je cherchais à établir la genèse, m’intéressait beaucoup ; mais le traitement que j’avais proposé ne fut pas accepté par les parents qui me firent comprendre qu’ils avaient l’intention de s’adresser à une célébrité étrangère, traitant par l’hypnotisme. Je rêvais donc qu’après l’échec complet de cette tentative, les parents me priaient d’instituer mon traitement à moi, disant qu’ils avaient maintenant pleine confiance, etc. Mais moi, je répondais : « Ah, oui, maintenant que je suis professeur, vous avez confiance. Le titre n’a rien ajouté à mes connaissances. Puisque vous ne vouliez pas de moi, lorsque j’étais « docent », vous vous passerez de moi aujourd’hui que je suis professeur. » Tout à coup ma rêverie est interrompue par un salut lancé à haute voix : « Bonjour, Monsieur le Professeur ! » ; je lève la tête et qui vois-je ? Les parents mêmes de mon ancienne malade dont je venais de me venger en repoussant les offres. Il m’a suffi d’un instant de réflexion pour constater qu’il n’y avait dans cette coïncidence rien de miraculeux. J’étais dans une rue droite, large, peu fréquentée, le couple venait dans ma direction ; en jetant devant moi un rapide regard, alors qu’ils étaient à une vingtaine de pas, j’ai certainement aperçu et reconnu leurs figures, mais, comme il arrive dans une hallucination négative, j’ai écarté cette perception, pour les motifs affectifs qui se sont manifestés dans la rêverie, laquelle a surgi avec toutes les apparences de la spontanéité.

Je rapporte, d’après M. Otto Rank, un autre cas d’ « explication d’un prétendu pressentiment » (Zentralbl. f. Psychoanal., II, 5) :

« Il y a quelque temps, j’ai fait moi-même l’expérience d’une bizarre variation de cette « miraculeuse coïncidence » qui consiste à rencontrer une personne