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toutes les néo-formations de la maladie ne se rapportent plus qu’à un seul point, précisément aux relations entre le patient et le médecin. Le transfert peut ainsi être comparé à la couche intermédiaire entre l’arbre et l’écorce, couche qui fournit le point de départ à la formation de nouveaux tissus et à l’augmentation d’épaisseur du tronc. Quand le transfert a acquis une importance pareille, le travail ayant pour objet les souvenirs du malade subit un ralentissement considérable. On peut dire qu’on a alors affaire non plus à la maladie antérieure du patient, mais à une névrose nouvellement formée et transformée qui remplace la première, Cette nouvelle couche qui vient se superposer à l’affection ancienne, on l’a suivie dès le début, on l’a vu naître et se développer et on s’y oriente d’autant plus facilement qu’on en occupe soi-même le centre. Tous les symptômes du malade ont perdu leur signification primitive et acquis un nouveau sens, en rapport avec le transfert. Ou bien, il ne reste en fait de symptômes que ceux qui ont pu subir une pareille transformation. Surmonter cette nouvelle névrose artificielle, c’est supprimer la maladie engendrée par le traitement. Ces deux résultats vont de pair, et quand ils sont obtenus, notre tâche thérapeutique est terminée. L’homme qui, dans ses rapports avec le médecin, est devenu normal et affranchi de l’action de tendances refoulées, restera aussi tel dans sa vie normale quand le médecin en aura été éliminé.

C’est dans les hystéries, dans les hystéries d’angoisse et les névroses obsessionnelles que le transfert présente cette importance extraordinaire, centrale même au point de vue du traitement. Et c’est pourquoi ou les a appelées, et avec raison, « névroses de transfert ». Celui qui, ayant pratiqué le travail analytique, a eu l’occasion de se faire une notion exacte de la nature du transfert, sait à n’en pas douter de quel genre sont les tendances refoulées qui s’expriment par les symptômes de ces névroses et n’exigera pas d’autre preuve, plus convaincante, de leur nature libidineuse. Nous pouvons dire que notre conviction d’après laquelle l’importance des symptômes tient à leur qualité de satisfaction libidineuse substitutive, n’a reçu sa confirmation définitive qu’à la suite de la constatation du fait du transfert.