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d’avenir, pour vous du moins. Permettez-moi seulement de revenir un moment à l’angoisse, pour dissiper une dernière obscurité que nous avons laissée la concernant. Nous avons dit qu’étant donnés les rapports bien connus qui existent entre l’angoisse et la libido, il ne nous paraissait pas admissible, et la chose est pourtant incontestable, que l’angoisse réelle en présence d’un danger soit la manifestation des instincts de conservation. Ne se pourrait-il pas que l’état affectif caractérisé par l’angoisse puisât ses éléments, non dans les instincts égoïstes du moi, mais dans la libido du moi ? C’est que l’état d’angoisse est au fond irrationnel, et son irrationalité devient surtout frappante lorsqu’il atteint un degré un peu élevé. Il trouble alors l’action, celle de la fuite ou celle de la défense, qui est seule rationnelle et susceptible d’assurer la conservation. C’est ainsi qu’en attribuant la partie affective de l’angoisse réelle à la libido du moi, et l’action qui se manifeste à cette occasion à l’instinct de conservation du moi, nous écartons toutes les difficultés théoriques. Vous ne croyez pas sérieusement, je l’espère, qu’on fuit parce qu’on éprouve de l’angoisse ? Non, on éprouve de l’angoisse et on fuit pour le même motif, qui est fourni par la perception du danger. Des hommes ayant couru de grands dangers racontent qu’ils n’ont pas éprouvé la moindre angoisse, mais ont tout simplement agi, en dirigeant, par exemple, leurs armes contre la bête féroce. Voilà certainement une réaction on ne peut plus rationnelle.