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en ce que lors de l’oubli d’un nom je reconnais immédiatement et sans hésiter que tel nom évoqué n’est qu’un nom de remplacement, tandis qu’en ce qui concerne l’élément d’un rêve nous ne gagnons cette conviction qu’à la suite de longues et pénibles recherches. Or même, dans les cas d’oublis de noms, nous avons un moyen de retrouver le nom véritable, oublié et plongé dans l’inconscient. Lorsque, concentrant notre attention sur les noms de remplacement, nous faisons surgir à leurs propos d’autres idées, nous parvenons toujours, après des détours plus ou moins longs, jusqu’au nom oublié, et nous constatons que, aussi bien les noms de remplacement surgis spontanément, que ceux que nous avons provoqués, se rattachent étroitement au nom oublié et sont déterminés par lui.

Voici d’ailleurs une analyse de ce genre : je constate un jour que j’ai oublié le nom de ce petit pays de la Riviera dont Monte-Carlo est la ville la plus connue. C’est ennuyeux, mais c’est ainsi. Je passe en revue tout ce que je sais de ce pays, je pense au prince Albert, de la maison de Matignon-Grimaldi, à ses mariages, à sa passion pour les explorations du fond des mers, à beaucoup d’autres choses encore se rapportant à ce pays, mais en vain. Je cesse donc mes recherches et laisse des noms de substitution surgir à la place du nom oublié. Ces noms se succèdent rapidement : Monte-Carlo d’abord, puis Piémont, Albanie, Montevideo, Colico, Dans cette série, le mot Albanie s’impose le premier à mon attention, mais il est aussitôt remplacé par Montenegro, à cause du contraste entre blanc et noir. Je m’aperçois alors que quatre de ces mots de substitution contiennent la syllabe mon ; je retrouve aussitôt le mot oublié et m’écrie : Monaco ! Les noms de substitution furent donc réellement dérivés du nom oublié, les quatre premiers en reproduisant la première syllabe, et le dernier la suite des syllabes et toute la dernière syllabe. Je pus en même temps découvrir la raison qui me fit oublier momentanément le nom de Monaco : c’est le mot München, qui n’est que la version allemande de Monaco, qui avait exercé l’action inhibitrice.

L’exemple que je viens de citer est certainement beau, mais trop simple. Dans d’autres cas on est obligé, pour rendre apparente l’analogie avec ce qui se passe lors de