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Vous allez dire : « Voilà une nouvelle supposition ! C’est la troisième, et la plus invraisemblable de toutes ! Comment ? Vous demandez au rêveur ce qu’il se rappelle à propos de son rêve, et vous considérez comme une explication le premier souvenir qui traverse sa mémoire ? Mais il n’est pas nécessaire qu’il se souvienne de quoi que ce soit, et il peut se souvenir Dieu sait de quoi ! Nous ne voyons pas sur quoi vous fondez votre attente. C’est faire preuve d’une confiance excessive là où un peu d’esprit critique serait davantage indiqué. En outre, un rêve ne peut pas être comparé à un lapsus unique, puisqu’il se compose de nombreux éléments. À quel souvenir doit-on alors s’attacher ? »

Vous avez raison dans toutes vos objections secondaires. Un rêve se distingue en effet d’un lapsus par la multiplicité de ses éléments, et la technique doit tenir compte de cette différence. Aussi vous proposerai-je de décomposer le rêve en ses éléments et d’examiner chaque élément à part : nous aurons ainsi rétabli l’analogie avec le lapsus. Vous avez également raison lorsque vous dites que, même questionné à propos de chaque élément de son rêve, le sujet peut répondre qu’il ne se souvient de rien. Il y a des cas, et vous les connaîtrez plus tard, où nous pouvons utiliser cette réponse et, fait curieux, ce sont précisément les cas à propos desquels nous pouvons avoir nous-mêmes des idées définies. Mais, en général, lorsque le rêveur nous dira qu’il n’a aucune idée, nous le contredirons, nous insisterons auprès de lui, nous l’assurerons qu’il doit avoir une idée, et nous finirons par avoir raison. Il produira une idée, peu nous importe laquelle. Il nous fera part le plus facilement de certains renseignements que nous pouvons appeler historiques. Il dira : « ceci est arrivé hier » (comme dans les deux rêves « sobres » que nous avons cités plus haut) ; ou encore : « ceci me rappelle quelque chose qui est arrivé récemment ». Et nous constaterons, en procédant ainsi, que le rattachement des rêves à des impressions reçues pendant les derniers jours qui les ont précédés est beaucoup plus fréquent que nous ne l’avons cru dès l’abord. Finalement, ayant toujours le rêve pour point de départ, le sujet se souviendra d’événements plus éloignés, parfois même très éloignés.