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II


Mme de Solminihac revint seule au manoir. Elle gravit un escalier conduisant dans la tourelle qu’ombrageait le tilleul, déjà couvert de feuilles, et pénétra dans une chambre profonde. Par les fenêtres ouvertes, la lune nonchalante épanchait son fluide d’ambre. Jacquemine allait et venait parmi cette obscurité striée de lumière blonde. On devinait ses mouvements à l’ondulation de sa tunique incertaine.

Au dehors, l’air s’assoupissait au creux des buissons. La mer, sur ses eaux infinies, berçait lentement d’aériennes visions. Le ciel, comme un fabuleux verger où croulent des fruits d’or, était chargé d’étoiles. De la vague montaient des accents inconnus, d’indistinctes musiques, et, parfois, une voix d’élégie s’élevait, chuchotant aux plages attentives je ne sais quoi d’ineffable. Par la nuit printanière, les bruits se