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notre tunique[1]. C’est dans cet esprit, enfin, qu’elle nous engage à abandonner, au nom de Dieu, nos frères et nos sœurs, nos pères et nos mères, nos femmes et nos enfants, afin de mériter la vie éternelle[2]. Ainsi, ce n'est pas seulement la fortune qui nous empêche d’arriver au royaume du ciel, la famille elle-même devient un obstacle au salut, et bienheureux est celui qui en fait le sacrifice. A cet abandon complet des biens et des liens de la vie, des plus saintes affections du cœur, viendront bientôt se joindre le mépris de la vie elle-même et l'attente impatiente de la mort. « O homme infortuné que je suis, s'écrie saint Paul, qui me délivrera de ce corps de mort ? » Ces idées, qui ont existé avant le christianisme, mais qui se sont développées plus particulièrement dans son sein, n’ont pas manqué de porter leur fruit ; elles ont donné naissance à la vie monastique, elles ont provoqué les communautés religieuses. Mais quelle est la nature, quel est le but de ces associations, depuis les esséniens et les thérapeutes, véritables moines de deux ou trois siècles plus vieux que l'Evangile, jusqu’aux couvents du moyen âge et des temps modernes ? Ni les esséniens, ni les thérapeutes, ni les ordres religieux plus récents, n'ont la prétention de réformer le monde, ou de le

  1. Saint Mathieu, v. 39 et 40.
  2. Saint Mathieu, chap. XIX, v. 29.