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mes, femmes, enfants, tous étaient nourris aux frais de l’État[1]. Enfin, chez les uns comme chez les autres, la communauté des biens entraîna à sa suite une pauvreté extrême, la proscription des sciences et des arts, la destruction de la famille, et des mœurs contraires à la nature[2]. Cependant, par une singulière aberration du génie, ce sont précisément ces deux constitutions, celles de Crète et de Lacédémone, que Platon avait présentes à la pensée lorsqu’il écrivit la République, A quoi se réduit, en effet, cette perfection qu’il poursuivait dans l’État ? À la communauté des biens, à la communauté des femmes et à la distinction des castes, c’est-à-dire à l’esclavage considéré, non pas comme un fait, mais comme une éternelle condition de l’ordre social. Platon était préoccupé de cette idée si vraie, si élevée, si féconde en elle-même, que la société doit être la plus haute expression de la nature humaine, qu’elle a pour fin dernière le développement de toutes nos facultés ; mais il pensait en même temps que cette fin doit être partagée, et qu’il n’y a dans la société ni unité ni harmonie, si les facultés qu’elle met en œuvre ne s’exercent séparément, personnifiées dans autant de classes différentes, l’intelligence dans la classe des magistrats, la volonté

  1. Aristote, Politique liv. II. chap. 7.
  2. Ubi supra et Strabon, liv. X