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xiv PRÉFACE.

devant nous, en nous-mêmes, et qu’il suffit pour la connaître de l’observer avec un esprit non prévenu. Oui, nous sommes restés fidèles à Descartes, en ajoutant à sa méthode et à ses doctrines ce que le progrès des siècles y ajoute naturellement. Nous sommes d’un pays où le bon sens, c’est-à-dire le tact de la vérité, ne saurait être blessé impunément. L’unité ! dites-vous. Pas de science sans unité ! Nous sommes du même avis ; mais nous voulons l’unité dans la vérité, et la vérité n’existe plus pour l’homme aussitôt qu’il prétend tirer tout de lui-même et se rendre indépendant des faits. D’ailleurs, quels sont donc les merveilleux résultats de cette méthode spéculative tant vantée, et dont la privation, à votre sens, condamne à la stérilité tous nos efforts ? S’il fallait la juger par là, c’est-à-dire par les fruits qu’elle a produits en vos propres mains, cela seul suffirait pour nous la faire repousser. Un dieu sans conscience et sans liberté, une âme qui se perd dans l’infini, qui n’a ni libre arbitre en ce monde, ni conscience de son immoralité après cette vie ; à la place des êtres en général, des idées qui s’enchaînent dans un ordre fatal et arbitraire ; enfin partout et toujours des abstractions, des formules algébriques, et des mots vides de sens ; est-ce là ce que nous devons regretter ?

Maintenant que le but et l’esprit de cet ouvrage doivent être suffisamment connus, il nous reste à dire sur quel plan il a été conçu et quels sont exactement les éléments qu’il embrasse ; mais auparavant nous croyons utile de montrer qu’il n’est pas sans antécédents dans l’histoire de la philosophie, qu’il vient répondre, au contraire, à un besoin depuis longtemps senti et qui subsiste encore malgré tous les efforts successivement tentés pour le satisfaire.

Deux essais de ce genre out déjà paru dans l’antiquité : c’étaient de simples vocabulaires de la langue philosophique de Platon, et dont l’un, le moins imparfait des deux, à ce que nous assure Photius, avait pour auteur Boëthe, le même probablement qui a écrit un commentaire sur les catégories d’Aristote ; l’autre, qui est seul parvenu jusqu’à nous, est l’œuvre du grammairien Timée le Jeune. Suidas nous parle