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PRÉFACE. jx

entière, ce dieu abstrait et vague dont nous venons de parler, le dieu du panthéisme devient à jamais impossible, et nous voyons à sa place la Providence, le Dieu libre et saint que le genre humain adore, le législateur du monde moral, la source en même temps que l’objet de cet amour insatiable du beau et du bien qui se mêle au fond de nos âmes à des passions d’un autre ordre.

6°. Enfin nous pensons que l’histoire de la philosophie est inséparable de la philosophie elle-même, et qu’elles forment toutes deux une seule et même science. Tous les problèmes agités par les philosophes, toutes les solutions qui en ont été données, tous les systèmes qui ont régné tour à tour ou se sont combattus dans un même temps, sont, de quelque manière qu’on les juge, des faits qui ont leur origine dans la conscience humaine, des faits qui éclairent et qui complètent ceux que chacun de nous découvre en lui-même : car comment auraient-ils pu se produire s’ils n’avaient pas en nous, dans les lois de notre intelligence, leur fondement et leur raison d’être ? Indépendamment de ce point de vue, qui fait de l’histoire de la philosophie comme une contre-épreuve et un complément nécessaire de la psychologie, nous admettons que la vérité est de tous les temps et de tous les lieux, qu’elle fait en quelque sorte l’essence même de l’esprit humain, mais qu’elle ne se manifeste pas toujours sous la même forme, ni dans la même mesure. Nous croyons enfin à un sage progrès, compatible avec les principes invariables de la raison, et dès lors l’état présent de la science se rattache étroitement à son passé ; l’ordre dans lequel les systèmes philosophiques se suivent et s’enchaînent, devient l’ordre même qui préside au développement de l’intelligence humaine à travers les siècles et dans l’humanité entière.

Tels sont, en résumé, les principes que nous professons et que nous avons essayé de mettre en lumière dans ce livre. Si nous sommes dans l’erreur, qu’on nous le prouve ; qu’on nous montre ailleurs, si l’on peut, les fondements éternels de toute morale, de toute religion, de toute science, ou qu’on avoue franchement qu’on regarde toutes ces choses comme de pures chimères. Si l’on trouve que nous ne sommes pas toujours