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Elles habitent des hameaux enfoncés dans les creux des vallons, entourés d’une telle quantité d’arbres, que les rayons du soleil ont de la peine à pénétrer dans leurs habitations. On dirait qu’ils choisissaient ainsi ces localités pour s’y soustraire aux regards des Bigourdans de caste réputée supérieure. « J’ai vu dans mon enfance, m’écrit M. Bualé d’Argelès, dans quelques vieilles églises, notamment dans celle de mon village (Saint-Savin), une porte d’entrée et un bénitier réservés pour l’usage des Cagots, qui assistaient aux offices divins dans une tribune particulière, sans contact avec les autres paroissiens. La chose est encore visible dans cette église presque détruite.

« J’ai vu encore une toute petite chapelle, où vingt personnes pouvaient à peine tenir, au hameau de Mailhoc, peuplé encore de ces malheureux : ce qui indiquerait qu’on y célébrait, pour eux seuls, les offices divins, à une époque que je ne puis préciser, mais certainement rapprochée de notre première révolution. Je me suis souvent arrêté à ce point, pour interroger les ruines de cette chapelle, vendue, à l’époque de la vente des biens nationaux, à un Cagot qui l’a démolie pour agrandir une petite propriété. »

Il existe dans la commune d’Aucun, au val d’Azun, un hameau situé à un kilomètre environ et à l’est du village, sur la rive droite du gave d’Azun ; ce hameau, traversé par le chemin qui va d’Aucun à Bun, contient en tout sept maisons bâties sur un sol aride et misérable : ce qui lui a sans doute valu son nom de Terranère (terre noire). Les habitants de cette localité, tous charpentiers depuis un temps immémorial, sont tenus pour Cagots d’origine ancienne, non-seulement par les gens d’Aucun, mais par les Bigourdans de toute la vallée, et l’on retrouve dans ce hameau le berceau de plusieurs familles de charpentiers répandues dans le département des Hautes-Pyrénées et toutes