Page:Francisco de Miranda - Le général Miranda à la Représentation nationale, 1795.djvu/7

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
(7)

part inacceſſible à l’innocence, ils m’accablèrent en lâches de leurs traits empeſtés. — Suivant eux, mes caiſſes de livres étoient remplies de fuſils : les Mémoires de mes voyages étoient des correſpondances avec l’Etranger : tout fut viſité, & partout l’on ne trouva que la calomnie. Il fallut enfin me chercher des délits dans l’avenir, afin de m’ôter le moyen d'en prouver l'inexiſtence. On imagina de dire que j’avois le projet d’un voyage à Bordeaux. Cambon l’annonça à la tribune de la Convention, &, quoi qu’aucun indice n’exiſtat & n’ait jamais pu exiſter, de ce voyage prétendu, Pache ſe fit donner, fous ce rédicule prétexte, l’ordre de me faire arrêter[1].

Depuis ce temps, voilà dix-huit mois que je languis dans les fers. Voilà dix-huit mois, que je ſuis traîné de priſons, en priſons, ſans qu’il m’ait été poſſible d’obtenir aucun ſecours ; ſans ſavoir ce que ſont devenus, après mon acquittement, mes chevaux, & mes voitures ; ſans avoir pû toucher aucun appointement, ſoit pour le tems où j’ai ſervi la République à la tête des armées, ſoit pendant ma première captivité ; ſans qu'il m’ait été poſſible de trouver le moindre refuge dans la banque anéantie ; & réduit enfin d’offrir de vendre une partie de ma bibliothèque pour ſubvenir à ma ſubſiſtance. En un mot, voilà dix-huit mois, paſſés, que j’attends que la tyrannie ſe fatigue, enfin, ſur ma perſonne.

  1. Il eſt bien extraordinaire qu’un membre du comité de ſalut public ſoit venu, dans la ſéance du 2 brumaire dernier, défigurer ce rapport, ſi étrangement, qu’il met mon nom à la place de celui de Dillon, inculpé alors de Capétiſme. Je ne crois pas que Delmas l’ait fait à deſſein ; mais il eſt certain que la mépriſe eſt groſſière le très-blâmable. (Voyez le Moniteur du 4 brumaire, & le rapport port de Cambon, du 11 juillet 795. (Vieux ſtyle.)