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SOUVENIRS D’UN PAGE.

que par une grande piété ou par un esprit vif et ardent que les petits moyens ne satisfont pas ; résolutions qui, en tout état de cause, font toujours l’étonnement des gens du monde.

Ce fut en 1771 que madame Louise, malgré les prières de son père, les larmes de ses sœurs, s’arracha aux délices de la cour pour aller, à trente-quatre ans, s’ensevelir dans un cloître de carmélites, et oublier, sous un cilice et dans un des ordres religieux les plus austères, les vaines grandeurs de la terre. La calomnie essaya bien de la poursuivre encore jusque-là, mais elle ne trouva point d’écho. Cependant bien des gens reprochèrent à madame Louise de s’être retirée à une si faible distance de la cour, de voir trop de monde, et, au milieu des travaux les plus bas qu’elle pratiquait comme la dernière religieuse, de se mêler encore des affaires du monde et des intérêts de l’État. Sans doute, plus éloignée de sa famille, vouée à une solitude plus profonde, son abnégation eût pu paraître plus complète ; mais son sacrifice n’était-il pas déjà assez grand, et sans s’arrêter à se demander si les exemples de vertu de madame Louise n’eussent pas été d’une plus grande utilité à la cour qu’au fond d’un cloître, ne sera-t-il pas toujours vrai de dire qu’il a fallu un grand courage pour prendre une semblable résolution ?

Madame Louise mourut en décembre 1787. Cet événement fit si peu de bruit, qu’étant alors malade, je ne l’appris que longtemps après. Cela n’était point éton-