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SOUVENIRS D’UN PAGE.

dans un coffre à son usage ; mais arrivé dans la salle des gardes, La Fayette, montant sur un tabouret, harangua les factieux, leur démontra la vérité de la conspiration par les armes qu’il venait de saisir, et, sans dire qu’il les tenait de la bonne foi du monarque, il livra ce dépôt à ses satellites, qui le pillèrent à l’instant.

Après ce grand exploit, La Fayette se retira et laissa une partie de ses troupes dans les cours, occupées à briser ces armes ou à tirailler avec. Ce tapage durait encore quand je retournai au château, vers les onze heures du soir, pour le coucher. Louis XVI, toujours maître de lui-même, y causa à son ordinaire, et ne témoigna d’humeur qu’au duc de Liancourt, bien prononcé pour le côté gauche de l’assemblée, et qui voulut faire remarquer que les bruits provenant des cours duraient encore.

Quand les armes eurent été livrées, plusieurs personnes voulurent se retirer. M. le duc de Piennes et un autre sortirent par la porte de la salle des gardes et par le grand escalier. À peine furent-ils dehors que nous entendîmes des hurlements et un tumulte épouvantables ; les portes s’ouvrirent et se refermèrent précipitamment, et nous vîmes rentrer M. de Piennes tout meurtri et tout échevelé. Aussitôt qu’on l’avait aperçu, les gardes nationaux s’étaient jetés sur lui, et l’auraient assommé s’il n’était rentré de suite. On était très-embarrassé. Comment se retirer ? toutes les issues étaient gardées par les soldats de La Fayette. Après bien des courses, les chefs de cette troupe obtinrent la per-